Mots-clés : diversité d'intérêts, désimplication, partage des infos, implication, témoignages
Voici ce que j'écrivais il y a un an... il me semble que c'était il y a bien plus longtemps....mais les mêmes sujets me préoccupaient..
Formation à distance, éducation populaire….Je fais partie de ces
naifs, de ces idéalistes qui dès la fin des années 90 ont rêvé un monde
meilleur grâce à l’apport des nouvelles technologies. Foin des scepTIC
et autres oiseaux de mauvaise augure, nous allions occuper l’espace
public, de nos forums (quel joli mot !!) allaient jaillir les idées de
demain… ces nouveaux moyens allaient abolir les distances, et dans la
foulée bien d’autres barrières, sociales, culturelles…
Ma foi. Nous avons vite compris que ce n’était pas si simple. Nous
avons testé la visio-conférence ? aie ! voilà que nous franchissions un
pas… en arrière ! Réactivité très difficile, contraintes techniques
finalement pesantes… Nous voulions mettre une partie des cours en ligne
? plouf ! statistiques de connexion en chute libre, harmonisation de
l’équipement des stagiaires problématique, formation des formateurs -
tuteurs… difficile...
Pour autant toutes ces années nous avons senti, frémi, tremblé devant
les extraordinaires possibilités offertes par la technique, devant ces
horizons chaque jour (au sens propre !) plus vastes. Bon sang ! Comment
ne pas être motivés, nous autres CEPJ ! Effrayés aussi devant l’ampleur
de la tâche !
En effet, tout est possible, ces outils sont là, devant nous. Les
années ont passé, tout est plus simple, plus compréhensible, plus
facilement mobilisable aussi. Mais. Il nous faut repenser nos
pratiques, questionner nos principes et nos méthodes… car voilà ce que
nous avons appris de ces années d’expérimentation au CREPS de Corse :
il est facile de former à distance d’une façon plus magistrale que
magistrale, il est beaucoup plus difficile encore qu’en présentiel de
placer le stagiaire au centre du processus d’apprentissage.
Depuis deux ans avec l’INJEP et le CREPS de Montpellier, nous
expérimentons une formule de préparation au concours de CEPJ en FOAD.
Ce projet nous a permis de porter tous nos efforts sur la pédagogie :
Nous maîtrisions le contenu de la formation (méthodologie de l’écrit)
testé pendant plusieurs années au cours de formations présentielles
d’une semaine, il nous restait à élaborer une stratégie, puisque cette
nouvelle formation nous donnait la possibilité de passer de 1 à 13
semaines !! du temps pour l’appropriation des savoirs, pour la
construction et l’amélioration des compétences.
Notre objectif n°1 était donc bien de conjuguer éducation populaire et
FOAD, pour permettre aux stagiaires de mieux appréhender « l’esprit du
concours », la moindre des choses finalement pour une formation durant
laquelle nous allions demander à nos stagiaires de décortiquer,
réfléchir, disserter sur les moindres aspects de l’éducation populaire !
Avons-nous réussi notre pari ?
Nous avons en tous cas largement avancé dans notre réflexion. Les
conditions de l’expérimentation étaient idéales pour porter tous nos
efforts sur cet aspect des choses : un contenu léger donc ; un coeur de
formation reposant sur la mise en situation des stagiaires ; une équipe
à l’INJEP portant le projet et nous dégageant, Jacques Rongère et moi,
des contingences matérielles et techniques ; et enfin une plate-forme
sympathique et simple à manipuler (développée à partir des systèmes
libres SPIP et surtout GANESHA).
Nous avons utilisé principalement : la publication de pages HTML
(programmes hebdomadaires), le forum (RDV hebdomadaires, travaux
collaboratifs et questions diverses), la messagerie et la bourse aux
documents (où chacun peut déposer des fichiers). Des outils fort
simples donc.
Un contenu simple également. Il s’agit de préparer les stagiaires aux 3
épreuves écrites du concours. Notre mot d’ordre : pas de connaissances
mais de la méthodologie, des mises en situation. Nous considérons que
c’est au stagiaire d’acquérir la somme de connaissances nécessaire,
nous l’aidons à s’organiser, à optimiser son temps de travail et ses
efforts, mais nous ne fournissons pas de « cours », uniquement des
bibliographies. Au programme : des recherches à effectuer, des fiches à
construire, des devoirs à réaliser, d’un bloc ou fractionnés
(introductions, conclusions, plans détaillés). Nous fournissons
quelques supports résumant quelques principes de méthodologie, c’est
tout.
Notre stratégie ? Adapter notre programme chaque semaine à la
progression du groupe, proposer chaque semaine une synthèse et de
nouveaux travaux, organiser une rencontre hebdomadaire sur le forum
(une sorte de chat ralenti), varier les exercices et les propositions,
favoriser l’entraide et la collaboration par la nature même des
exercices proposés.
Le bilan ? la première année nous avons perdu beaucoup de
stagiaires en route. Nous avions sous-évalué le sentiment de solitude
ressenti par le stagiaire (et parfois le tuteur), seul face à sa
machine. Nous avons aussi mesuré à quel point l’aisance face aux outils
varie d’un stagiaire à l’autre et modifie radicalement sa participation
à la formation.
Cette deuxième année, nous avons fait le choix d’introduire une
rencontre en présentiel afin d’améliorer la cohésion du groupe et
réduire le sentiment d’isolement. L’amélioration a été très nette. Nous
avons enregistré d’autres abandons mais bien moins.
Notre grande réussite ? Les travaux collaboratifs, les
propositions spontanées d’entraide et de nouvelles collaborations, la
première comme la deuxième année. Un exemple ? L’exercice consiste à
construire une liste de thèmes incontournables à réviser. Un « fil »
spécial est ouvert sur le forum et chaque stagiaire apporte sa
contribution en enrichissant la liste. Autre exemple ? les deux années,
les stagiaires se sont spontanément organisés pour réaliser des devoirs
supplémentaires en auto-correction.
Sur le plan pédagogique, il me parait intéressant de souligner que la
plus grande partie des apports méthodologiques n’est pas fournie sous
forme de documents à télécharger, mais dans les commentaires,
observations et corrections réalisées à partir du travail de chacun et
de tous (pour les travaux partagés). Ainsi, et d’une façon simple, nous
nous plaçons bien dans une pédagogie partant du principe que «
l’expérimentation (ici, la mise en situation) est un moyen d’accès pour
l’apprentissage », utilisant les méthodes actives… à distance.
Enfin, nous avons pu observer, réguler, gérer des conflits en lien avec
des phénomènes de groupes tout à fait semblables à ceux rencontrés en
présentiel. Par exemple : il faut bien admettre que malgré toutes nos
incitations, l’entraide ne se décrète pas si facilement, surtout dans
le contexte particulier de la préparation au concours. Certains ont pu
par conséquent avoir la sensation de beaucoup donner au groupe (en
produisant, en répondant aux sollicitations des tuteurs) tandis que
d’autres, bien plus discrets, pouvaient laisser penser qu’ils
profitaient de ces apports sans participer à l’effort collectif. Ces
confrontations, les solutions apportées par le groupe lui-même à ces
conflits, me semblent également relever de l’éducation populaire et de
ses pratiques.
Repartir du sens, replacer nos pratiques au centre de nos
réflexions, chercher avec l’équipe (Dominique Diamand-Martin,
Jean-Christophe Sarrot, Jacques Rongère) comment se servir des outils
de la formation à distance en utilisant des méthodes actives m’a permis
de passer un cap dans ce voyage vers l’inconnu… Il me parait maintenant
envisageable d’aborder des formations plus longues, nécessitant des
contenus plus importants, car je sais qu’il est possible de
s’affranchir des contraintes imposées par les outils, pour continuer à
promouvoir, expérimenter et faire vivre l’éducation populaire.
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